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01-11-2011, Nice

L'interview avec l'archiprêtre Nicolas Ozoline, recteur de la cathédrale Saint Nicolas.

Les médias russes et français débattent ces derniers temps de la situation autour de la cathédrale orthodoxe Saint Nicolas à Nice. « Pravoslavie.ru » s’est adressé à l’archiprêtre Nicolas Ozoline, le nouveau recteur de la cathédrale, afin qu’il puisse exposer sa vision des choses. Le père Nicolas est le fils du père Nicolas Ozoline (père), professeur très connu de l’Institut de théologie Saint Serge à Paris (ITO).

- Père Nicolas, vous êtes né et vous avez grandi en France dans une famille d’émigrés russes ; c’est là que s’est déroulée votre jeunesse, c’est en France que résident vos parents. Par la suite vous êtes allé vous installer en Russie où vous avez officié pendant de longues années et où vous avez fondé une famille. Vous voilà de retour en France, vous y avez été désigné pour vivre et travailler à Nice. Vous considérez vous comme étant russe ou français ?

- Nous connaissons diverses étapes dans nos vies, il est difficile de préfigurer l’itinéraire d’une personne. En effet, je suis né à Paris et j’ai grandi en France, un pays auquel je suis très attaché. Mais c’est en Russie que j’ai connu les années les plus actives de ma vie. C’est en Russie que je suis devenu ce que je suis, que j’ai trouvé ma vocation de recteur et que j’ai fondé une famille. J’ai fait un choix, je me considère appartenir à la Russie. Je suis heureux d’avoir la nationalité russe.
 

Comment définir votre mission à Nice ? Pour quelles raisons avez-vous été désigné dans cette ville ?

- C’est Sa Sainteté le patriarche Cyrille qui m’a missionné à Nice. Il me faut organiser la vie liturgique de la cathédrale, cela sous la direction de Mgr Nestor qui est à la tête du diocèse de Chersonèse. Il me faut prendre en charge les orthodoxes résidant dans le Midi de la France. Nous savons que l’on compte actuellement près de 250.000 Russes qui vivent sur la Côte d’Azur. Ce chiffre englobe les ressortissants de l’ensemble des pays de l’ex URSS. Les familles orthodoxes en constituent la majorité. Ma mission consiste à les ecclésialiser. C’est une tâche immense. Mais je l’appréhende avec joie et optimisme. Mes origines françaises, ma connaissance du milieu émigré et de ses spécifités ne sont sans doute pas pour rien dans ma nomination.

- Les relations entre le patriarcat de Moscou et celui de Constantinople sont loin d’être simples, ce n’est un secret pour personne. Il s’agit tout particulièrement de la situation en Europe occidentale et, surtout, en France. A votre arrivée à Nice vous avez concélébré avec des prêtres appartenant au patriarcat de Constantinople. Les clés de la cathédrale n’ont pas encore été remises à l’Eglise russe mais est-ce que ces concélébrations ne permettent pas d’espérer que le conflit trouvera sous peu une solution positive et pacifique ?

- Je vous remercie de m’avoir posé cette question. Le 18 août, à mon arrivée à Nice, la veille de la fête de la Transfiguration de Notre Seigneur, j’ai pu m’entendre avec le père Jean Gueit quant à notre concélébration de cette grande fête. C’était pour moi une grande joie spirituelle car récemment encore j’étais le recteur de l’église de la Transfiguration dans l’île de Kiji, au Nord de la Russie. J’ai donc une perception tout à fait particulière de cette grande fête qui était dans cette contrée la plus joyeuse de toutes celles de l’été.

J’ai perçu cette concélébration à Nice comme un signe de bonne volonté de chacune des deux parties. J’avais le sentiment qu’un nouveau chapitre allait s’ouvrir dans la vie de la paroisse. Nous pouvions penser que nous sommes au début de pourparlers qui conduiraient à une nouvelle organisation de la vie de la cathédrale. Je voulais à tout prix éviter les aspérités susceptibles d’être perçues comme humiliantes par le père Jean et les siens. L’issue de la crise était évidente aux yeux de tous : il fallait trouver une conclusion digne à une période déterminée dans la vie de la cathédrale et en commencer une autre. Cette vision s’est renforcée en moi grâce aux quatre offices que nous avons dits ensemble. Il convient de préciser qu’à mes yeux le père Jean continuait à être le recteur de la paroisse. Nous commémorions exclusivement le patriarche de Constantinople. J’ai accepté cette condition qui m’avait été posée car cela devait favoriser le début des pourparlers et d’une période dite de transition. Malheureusement ce début a été troublé par la mise en ligne sur le Net d’un entrefilet annonçant ma nomination en tant que recteur. Je tiens à préciser que le père Jean était au courant de cela et en avait été averti à l’avance. La publication de cette nouvelle ne fut pas de son goût. A partir de ce moment il ne manifesta plus le moindre désir de coopérer avec moi.

- Ainsi, vous ne pouvez plus depuis ce jour officier à la cathédrale et vous y êtes considéré comme une sorte d’envahisseur ?

- Pas du tout. Je ne suis nullement un envahisseur les paroissiens le savent parfaitement. Je me tiens parmi les fidèles et je prie avec eux. Dans l’Etat de droit qu’est la France, un pays régi par ses lois, les Tribunaux ont disposé de la restitution de cette magnifique cathédrale à la Russie. C’est la Fédération de Russie et non le patriarcat de Moscou qui ont entamé les procédures judiciaires. Il est indispensable de rappeler que la Fédération avait à l’époque proposé à l’ACOR de se maintenir dans les lieux à condition de reconnaître que la cathédrale et le terrain sur lequel elle est bâtie sont la propriété de la Russie. L’ACOR a rejeté cette proposition. A la suite d’un procès fort difficile la Russie a eu à deux reprises gain de cause.

Pendant cette longue période de procédures judiciaires le recteur Jean Gueit a mené « une politique extérieure » anti russe à l’extrême. Son langage était celui employé par l’Eglise Hors Frontières pendant les années de « la guerre froide ». L’ACOR persévère jusqu’à présent dans ce sens. Ce comportement inamical a fait qu’il ne restait en définitive à la Fédération de Russie qu’à s’adresser au patriarcat de Moscou et à solliciter l’Eglise russe de prendre dorénavant en charge la vie ecclésiale de la cathédrale.

- Ce que vous dites est très important car ces derniers temps la cathédrale reste fermée. Des panonceaux annoncent que c’est à la demande de la Fédération de Russie. Auparavant l’église faisait également office de musée, les entrées y étaient payantes. La cathédrale serait désormais fermée car les entrées payantes ont été supprimées et ce n’est qu’aux heures des offices que les portes restent ouvertes. Que direz-vous de cet état de choses ?

- Les décisions récentes prises par le père Jean Gueit sont plus que regrettables. Avant d’avoir été interdite d’accès par l’ACOR la cathédrale était le monument le plus visité de toute la Côte d’Azur. Les visiteurs affluaient de très loin pour admirer ce site. Désormais nous sommes tous privés de ce plaisir. Cet état de choses est parfaitement inacceptable. Quelques éclaircissements : le panonceau posté par l’ACOR dit que « la cathédrale est fermée à la demande de la Fédération de Russie ». Pure contre-vérité. Jamais la Fédération de Russie n’a formulé de telles exigences. Il s’agit d’un stratagème induisant en erreur les visiteurs qui ne sont pas au courant de la situation et qui tirent des conclusions hostiles à l’égard de la Russie.

- Que pouvez-vous dire de la vie de la paroisse ? Lorsque nous avons assisté il y a un certain temps à un office nous avons été désagréablement surpris par le peu de fidèles réunis pour une fête aussi solennelle que celle de l’Exaltation de la Sainte Croix. Les lectures étaient inintelligibles et se faisaient tantôt en français, tantôt en russe moderne, et non en slavon d’église. Les chants nous ont paru mal ordonnancés et hésitants. N’est-ce pas un peu triste lorsqu’il s’agit de la plus grande église russe de la région ? Comment expliquez-vous cela ?

- Le choix du français en tant que langue liturgique se justifie par la présence de nombreux francophones parmi les fidèles. Cela fait partie de la mission orthodoxe. Le père Jean Gueit a délibérément opté pour le russe moderne car il estime que les Russes venant du pays et peu ecclésialisés comprendront mieux les offices s’ils sont dits dans une langue qui leur est familière. Ce point de vue est contestable car en Russie les offices sont dits en slavon. Nos compatriotes s’attendent à des offices qui leurs soient coutumiers, c’est-à-dire en slavon d’église. De très nombreux paroissiens de Saint Nicolas viennent me trouver pour me demander de reprendre le slavon à l’avenir.

- La diaspora russe est très nombreuse en France. On trouve également de très nombreux Français « de souche » convertis à l’orthodoxie. Si vos projets venaient à se réaliser espérez-vous amener beaucoup de nouveaux fidèles à la foi orthodoxe ?

- Je crois que les résultats seront, en tout cas les premiers temps, très modestes. Il faut pouvoir s’appuyer sur un noyau de paroissiens actifs, disposer d’une chorale de qualité et réunir des croyants qui soient pénétrés du désir de vivre en Eglise et prêts à accepter des sacrifices pour cela. Les travaux de réfection prendront quelques mois pendant lesquels la cathédrale devra rester fermée. Nos compatriotes sont très nombreux à Nice, il faudra les faire venir. Un certain temps sera nécessaire pour faire revenir la cathédrale à une vie ecclésiale normale telle que nous nous la voyons. Les débuts ne seront pas triomphants, il n’y a pas lieu d’être excessivement optimiste….

- Vous êtes à Nice dans une situation peu confortable ? Est-ce que l’île de Kiji et la ville de Pétrozavodsk vous manquent ?

- Je me sens chez moi en France, c’est un pays auquel je suis très attaché et que je connais bien. J’ai grandi avec les émigrés russes, je sais comment ils appréhendent l’Eglise russe. Je suis troublé par le fait que le père Jean et ceux qui l’entourent ne veulent pas admettre que de grands changements sont survenu en Russie. Je suis troublé par le fait que ces gens s’accrochent tellement à un bâtiment qui appartient à la Russie, un pays qu’ils aiment si peu. Je crois que nous avons affaire à une communauté qui par son action, par son radicalisme commence à verser dans un état d’esprit sectaire. Phénomène plus que triste et dangereux. Si regrettable que cela puisse paraître le père Jean entrera dans l’histoire comme celui qui par ses décisions aveugles a perdu pour l’Archevêché la cathédrale Saint Nicolas.

J’ai déjà dit que je me perçois en tant que Russe : Pétrozavodsk est mon lieu, mon foyer. C’est là que je me suis formé en tant que personnalité. Mes premières et meilleures années de prêtrise ont été vécues à Kiji. Kiji est un endroit très fort dans ma vie. C’est une île d’une grande beauté et j’y suis profondément attaché. Je pense souvent et beaucoup aux habitants de l’île, aux collaborateurs du Musée. Je commémore toujours les paroissiens de Pétrozavodsk et je prie pour eux. C’est là-bas que je me suis formé, c’est là-bas que je me suis attaché à la Russie. Tout ceci est pour moi essentiel.

Nous vous souhaitons de pouvoir obtenir à Nice des succès aussi importants que ceux que vous avez obtenus à Kiji.

- Que Dieu vous entende ! J’espère que les orthodoxes vont prier pour le succès de nos initiatives. J’espère que la cathédrale deviendra un îlot de la Russie et apportera beaucoup de réconfort à nos compatriotes.

le 1er novembre 2011
Pravoslavie.ru
Traduction "PO"